phobie sociale

1. Les situations quotidiennes difficiles dans la phobie sociale

Famille de situations

Exemples concrets

Gêne dans la vie quotidienne

Situations où il faut réussir une performance

Faire un exposé ou lire un texte face à un groupe, passer un examen oral, un entretien d’embauche…

On ne peut prendre la parole dans les réunions professionnelles ou de parents d’élèves, lire de texte lors de cérémonies familiales ou religieuses…

Situations où il faut bavarder ou échanger quelques mots.

Parler de la pluie et du beau temps avec des voisins, des commerçants, des collègues de travail…

On évite de croiser ses voisins, ou d’aller chez les petits commerçants, on ne participe pas à la pause-café au travail…

Situations où il faut se révéler ou rentrer dans des discussions approfondies.

Nouer une relation durable avec quelqu’un, parler de soi, répondre à des questions personnelles…

On évite les invitations, on fuit les relations amicales ou sentimentales…

Situations où il faut s’affirmer

Donner son avis, dire que l’on est pas d’accord, répondre à des critiques ou des remarques…

On ne fait jamais entendre son point de vue dans les discussions, on ne sait pas réclamer ou faire face aux vendeurs…

Situations où l’on va être observé

Manger, boire, écrire si on nous regarde; rentrer dans un endroit où il y a déjà du monde (transports en commun, salle d’attente)…

Ne plus aller au restaurant, aux " pots ", ne plus pouvoir rédiger un chèque ou un formulaire. Devoir arriver en premier dans les salles de réunion…

Tableau tiré de : Christophe André et Patrick Légeron, La peur des autres : trac, timidité et phobie sociale, Editions Odile Jacob, 3e éd., p. 302

 

2. Différences entre les types d’anxiétés : le trac, la timidité, la phobie sociale et la personnalité évitante.

 

Anxiété bénigne,
" normale "

Anxiété sévère,
pathologique

Anxiété liée à une
situation précise

Trac

Phobie sociale

Anxiété généra-
lisée à plusieurs
situations

Timidité

Personnalité
évitante

Tirée de Christophe André et Patrick Légeron, La peur des autres : trac, timidité et phobie sociale, Editions Odile Jacob, p.92

 

3. Questionnaire sur les traits d’évitement :

Ce petit questionnaire ne vous dira pas si vous avez le trouble de la personnalité évitante mais bien si vous avez des traits d’évitement et à les identifier. Il est normal d’avoir des traits d’évitement quand on souffre de phobie sociale.

  1. Il m’est arrivé de refuser des invitations par peur de me sentir mal à l’aise.

  2. Ce sont plutôt mes amis qui m’ont choisi(e) et non l’inverse.

  3. Dans la conversation, je préfère souvent me taire par peur de dire des choses inintéressantes.

  4. Si je me suis senti(e) ridicule devant quelqu’un, je préfère ne jamais plus le revoir.

  5. Je suis moins à l’aise en société que la moyenne des gens.

  6. Par timidité, j’ai manqué plusieurs occasions dans ma vie personnelle ou professionnelle.

  7. Je ne me sens à l’aise qu’en famille ou avec de vieux amis.

  8. J’ai souvent peur de décevoir les gens, ou qu’ils ne me trouvent pas intéressant(e).

  9. Il m’est très difficile d’engager la conversation avec une nouvelle connaissance.

  10. Il m’est arrivé plus d’une fois de prendre un peu d’alcool ou des tranquillisants juste pour me sentir mieux avant de rencontrer des gens.

Si vous avez répondu OUI à l’une ou l’autre des questions, vous connaissez quel(s) est/sont votre (vos) trait(s) d’évitement.

Tiré de : Lelord et André, " Comment gérer les personnalités difficiles ", p. 295

 

4. Test : Evaluez votre peur des autres

Test mis en ligne par Alain et tiré du livre "La peur des autres"

http://www.phobiesociale.org/test

Il est intéressant de faire ce test régulièrement, les résultats peuvent varier.

 

 5. Types de personnalité évitante :

Il y aurait deux types de personnalité évitante (Lelord et André, " Comment gérer les personnalités difficiles) :

  • Les grands anxieux qui arrivent à nouer des relations positives avec quelques personnes;

  • Ceux qui sont tout autant anxieux que susceptibles, qui ont de la difficulté à faire confiance aux autres et qui vivent dans une grande solitude.

Par ailleurs, Robison dans " Disordered personailities " parle lui aussi de 2 types d’évitants :

  1. Les grands anxieux (souvent a eu une enfance normale, les relations parents-enfants étaient saines), ces cas profitent bien des thérapies comportementales, de l’entraînement aux habiletés sociales et de la désensibilisation progressive;

  2. Ceux qui sont anxieux et susceptibles (souvent une enfance avec relations parents-enfants malsaines, jugement des parents, attentes trop élevées…), ces cas profitent mieux des thérapies analytiques.

Avant de parler de troubles de la personnalité il faut tout d’abord atteindre l’âge adulte. Il est en effet fréquent qu’à l’adolescence on traverse une phase se rapprochant de l’évitement. Ce n’est qu’après plusieurs années de vie adulte que le psychiatre peut poser un diagnostic.

6. Types d’anxiété :

Enfin, l’anxiété, il y aurait 3 types d’anxiété (Lelord et André, p. 279) :

  • l’anxiété sociale " normale " : parler en public, solliciter un emploi, passer une entrevue…;

  • les phobies sociales, " qui provoquent une anxiété plus forte, et un évitement systématique de certaines situations redoutées;

  • l’anxiété de la personne évitante, plus insidieuse avec une crainte presque permanente d’être jugée et rejetée " (p. 280)

 

7. La comorbidité :

Un petit mot sur la comorbidité. Qu’est ce que la comorbidité? La comorbidité pourrait être défini comme toutes les pathologies qui peuvent être associées ou rencontrées en même temps qu’une pathologie principale. Ainsi si on parle de phobie sociale, se serait tous les autres problèmes qu’on rencontre assez souvent chez les gens atteints de phobie sociale.

Autres types de problèmes qui sont souvent associés à la phobie sociale.

  • la phobie simple (c’est la peur d’une chose en particulier – les araignées par exemple).

  • l’agoraphobie, il arrive qu’on souffre également de peur des espaces, des foules, mais habituellement on émet le diagnostic d’agoraphobie que si ce dernier prédomine.).

  • le trouble de la personnalité évitante apparaît lorsque la phobie sociale est très sévère et que la crainte d’être jugée et rejetée est presque permanente. (On peut souffrir de phobie sociale avec des traits d’évitement, c’est-à-dire qu’on évite les situations redoutées sans pour autant souffrir de trouble de la personnalité).

  • l’alcoolisme, les dépendances aux drogues, se retrouvent souvent chez les gens souffrant de troubles anxieux car ils tentent de soulager leur souffrance par ces substances. (A éviter car malgré le soulagement immédiat on a un effet contraire quelques heures plus tard).

  • la dépression majeure est aussi fréquemment rencontrée chez les gens qui souffrent de phobie sociale.

  • le trouble panique lui aussi est associé à la phobie sociale lors des épisodes de crise.

  • le trouble d’anxiété généralisé.

Pour le trouble de la personnalité évitante, la comorbidité est à peu près la même que celle de la phobie sociale.

 

8. La prévalence :

La prévalence est le nombre de cas enregistrés dans une population déterminée, ainsi combien y a t il de phobiques sociaux (PS) dans la société? Combien de troubles de la personnalité évitante…. Les stats quoi! Tout d’abord, avant de déterminer le nombre de cas affectés, il faut définir ce qu’on entend par phobie sociale ou personnalité évitante. Ainsi, on peut lire certains rapports affirmant que la phobie sociale est le problème le plus répandu après l’alcoolisme! Il faut alors se demander quelle est la définition de phobie sociale utilisée pour cette grille. S’agit-il de phobie généralisée, de phobie simple, de phobie sociale d’une durée inférieure à 12 mois, de phobie sociale à vie??? S’agit-il de trouble de la personnalité évitante avec phobie sociale et de quel type de personnalité évitante? Enfin, il faut toujours savoir combien de cas ont servis pour l’étude et d’où ils provenaient : population en général, population psychiatrique… Etude réalisée pendant 1 mois sur 100 cas ou étude réalisée sur 10 ans avec des milliers de cas pris dans la population en général. Enfin, le pays d’où origine l’étude peut être important également. S’agit-il de la Chine (où les personnes timides sont considérées comme supérieures et traitées avec respect), s’agit-il du Japon (où l’anxiété est plus élevée…) etc… Il nous faut donc être extrêmement prudent lorsqu’on parle de prévalence et de statistiques. Quelle est enfin la prévalence de la phobie sociale et/ou du trouble de la personnalité évitante, se demande t on? Y a t il des études sérieuses là dessus… et bien même pour les études bien documentées les proportions varient

 

9. Prévalence à vie des troubles anxieux (%)

Troubles

Étude ECA*

Enquête NCS

Étude Edmonton

Trouble panique

0,9 %

3,5 %

1,2 %

Agoraphobie

4,2 %

5,3 %

2,9 %

TOC

---

---

3,0 %

Phobie sociale

2,8 %

13,3 %

1,7 %

AG

---

5,1 %

---

Phobie spécifique

11,2 %

11,3 %

7,2 %

ESPT

---

7,8 %

---

Aucun TA

10,4 %
25,1 %*

24,9 %

11,2 %

*selon les données de trois des cinq aires de recrutement de l'ECA (Epidemiological Catchment Area)
  • selon les données de trois des cinq aires de recrutement de l’ECA (Epidemiological Catchment Area)

  • TOC = trouble obsessionnel-compulsif;

  • AG = anxiété généralisée;

  • ESPT = état de stress post-traumatique;

  • Étude ECA = Epidemiological Catchment Area Study (Bourdon et coll., 1988; Robins et coll., 1984);

  • NCS = National Comorbidity Survey (Kessler et coll., 1994).

  • L’Étude Edmonton renvoie à l’étude de prévalence réalisée dans la ville d’Edmonton par Bland et ses collaborateurs (1988).

Note explicative :
Ces écarts (Enquête ECA et Étude Edmonton) ont été attribués à la normalisation des taux de prévalence en fonction de la population de recensement de chaque aire de recrutement et non pas en fonction d’une population identique (Bland et coll., 1988) ainsi qu’aux différences observées entre les questions et les consignes données aux intervieweurs (Robins et coll., 1984). D’après Kessler et ses collaborateurs (1994), un certain nombre de facteurs méthodologiques expliquent que les taux de prévalence soient plus élevés dans la NCS que dans les deux autres enquêtes, notamment : le recours à un échantillon national, l’accent mis sur des sujets plus jeunes (15-54 ans), l’utilisation d’un facteur de pondération pour tenir compte du biais de non-réponse et l’application des critères du DSM-III-R (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, 3e éd.) plutôt que ceux du DSM-III. Bien que l’instrument utilisé dans l’enquête NCS (la Composite International Diagnostic Interview ou CIDI; Robins, Wing, Wittchen et Helzer, 1988) s’apparente à l’instrument utilisé dans l’étude de l’ECA (le Diagnostic Interview Schedule ou DIS; Robins, Helzer, Croughan et Ratcliff, 1981), Kessler et ses collaborateurs sont d’avis que les taux de prévalence plus élevés mis en évidence par l’Étude NCS sont peut-être attribuables aux différences observées dans la formulation des questions et le degré de détail de l’enquête.

Tiré de : Les troubles anxieux : orientations futures de la recherche et du traitement : Document de recherche, Santé Canada, 1996.
http://www.hc-sc.gc.ca/hppb/sante-mentale/pubs/anxieux/index.html

 

10. Article sur la personnalité évitante :

Les évitants

Ces grands timides que sont les personnalités évitantes éludent les responsabilités et présentent, comme dans les phobies sociales, la peur de parler en public, d’être regardé pendant le travail ou les repas, d’être critiqué, de ne pas être à la hauteur, de commettre des erreurs, d’être rejeté. "Pourvu que personne ne s’aperçoive à quel point je suis nul ! " s’écrient-ils. Mais, à l’inverse, les évitants cherchent à communiquer avec leur prochain et manifestent une grande dépendance à l’égard des proches qui procurent un refuge. Leur territoire est limité à des situations familières, impliquant peu de contacts sociaux. Ils se réfugient dans un imaginaire parfois favorisé par la consommation d’alcool ou de cannabis, et la pathologie se complique d’états dépressifs ou de troubles anxieux aigus nécessitant des traitements psychiatriques. On retrouve à l’origine des personnalités évitantes une éducation trop exigeante, des parents narcissiques et méprisants – rien ne trouvant grâce à leurs yeux -, des frères et sœurs moqueurs, des brimades physiques ou morales répétées, des humiliations publiques face aux camarades de classe. La psychanalyse et les psychothérapies de soutien s’éternisent à force de réassurances et parfois d’une substitution affective (transfert). Les psychothérapies comportementales et cognitives, pourtant plus efficaces, sont souvent évitées ou abrégées par peur de s’exposer aux situations redoutées.

Du caractère timide ou orgueilleux à la personnalité évitante ou paranoïaque, la frontière est parfois ténue.

Certaines pathologies correspondent à l’exagération de traits de la personnalité normale

La personnalité est ce qui caractérise un individu et rend prévisibles son comportement, ses émotions, ses opinions, quels que soient le moment ou le contexte. Evaluer la personnalité d’autrui est indispensable pour choisir ses partenaires dans la vie privée et professionnelle, pour nommer des responsables ou élire des politiques ; la plupart du temps, l’intuition, l’expérience et les ressources de la " psychologie ordinaire " permettent de faire approximativement le bon choix. Certains croient devoir recourir à la numérologie, à la graphologie, aux signes du zodiaque, qui pourtant ne permettent pas de prédire les conduites : le psychiatre Hans Eysenck, au cours des années 50, a démontré de façon rigoureuse, par l’analyse factorielle, que la " psychomorphologie " et le test de Rorschach (interprétation des taches d’encre) n’avaient aucun pouvoir prédictif. Ces méthodes ont été peu à peu abandonnées pour le recrutement dans les entreprises de tous les pays développés, excepté en France, et sont supplantées par des méthodes plus scientifiques telles que les entretiens structurés ou semi-structurés, les questionnaires et les échelles d’évaluation validées par les psychologues différentialistes à partir de modèles dimensionnels. Ces derniers, sur la base d’une analyse factorielle, permettent de quantifier de trois à cinq facteurs dans la personnalité, tels que la recherche de la nouveauté, l’évitement du danger, la dépendance à l’égard de la récompense, la détermination ou la coopération.

Les troubles de la personnalité sont l’exagération d’un certain nombre de traits de la " personnalité normale " (sans caractère pathologique du point de vue de la psychologie différentielle). Dans les versions pathologiques, cette exagération engendre des difficultés relationnelles permanentes, non conformes au contexte social, qui occasionnent de la souffrance pour le sujet ou son entourage. Les conduites rigides et inadaptées sont responsables d’échecs affectifs et professionnels à répétition. Constitués au cours de l’adolescence, les troubles de la personnalité persistent toute la vie.

Les psychanalystes les nomment " névroses de caractère ", ce qui évoque la dénomination populaire et stigmatisante de "caractériel ", " difficile à vivre "; ils les différencient des névroses, psychoses et perversions parce que ces troubles de la personnalité s’avèrent trop difficiles à soigner pour constituer de bonnes indications de la psychanalyse.

Ces pathologies ont donc été laissées pour compte jusqu’à la publication du DSM, le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux de l’Association américaine de psychiatrie, qui répertorie la totalité des symptômes psychiatriques et les définit par des critères catégoriels selon cinq axes descriptifs : troubles cliniques (anxiété, dépression, abus de substances psychoactives…) ; troubles de la personnalité et retard mental ; affection médicales générales ; problèmes psychosociaux et environnementaux ; évaluation globale du fonctionnement.

La prévalence des troubles de la personnalité est peu élevée dans la population générale (environ 10 % au total) – chacun de ces troubles n’excédant pas 2 % - mais atteint 50 à 70 % dans les populations cliniques (consultants externes ou hospitalisés en psychiatrie).

Chez les sujets atteints d’une maladie organique chronique, ces pathologies de la personnalité compromettent leur prise en charge et d’une manière générale le respect de la thérapeutique prescrite.

Rarement isolés, ils s’associent et interfèrent avec l’ensemble des troubles psychiques d’un sujet (la " comorbidité "), qu’ils contribuent à rendre résistants aux thérapeutiques. Ils chronicisent les dépressions et les troubles anxieux, notamment les attaques de panique, les agoraphobies, et les troubles obsessionnel-compulsifs. Ils sont au carrefour de tous les troubles psychiques et aggravent les perturbations du comportement alimentaire, l’alcoolisme, le tabagisme, les toxicomanies, l’addiction sexuelle, les conduites à risque, les violences intra familiales ou publiques, l’absentéisme professionnel répété. Il en résulte des coûts médico-sociaux considérables, en plus de la souffrance psychique subie ou infligée aux proches.

La classification en dix personnalités-types ici présentée (issue du DSM IV) – comme celle de la Classification internationale des maladies (CIM 10) de l’Organisation mondiale de la santé qui en compte huit -, ne fait pas l’unanimité, surtout en France. Ses critères diagnostiques sont appelés à évoluer, comme leur dénomination, ne serait-ce qu’à cause de leur caractère stigmatisant. En effet, les personnalités " paranoïaque ", " antisociale " ou " borderline " ne bénéficient pas d’une bonne image de marque.

Néanmoins, les troubles de la personnalité intéressent de plus en plus les professionnels de la santé mentale, car des voies thérapeutiques nouvelles existent désormais, en cours d’évaluation, ouvertes par la psychopharmacologie et surtout par les psychothérapies cognitivo-comportementales actuellement en plein essor.

Tiré de :
http://www.sciences-et-avenir.com/hs_122/page68.html
Investigateur principal : Programme Hospitalier de Recherche Clinique : "Etude multicentrique contrôlée des résultats et des processus de la thérapie cognitivo-comportementale dans les phobies sociales". Financement PHRC : 1994-1996. Avec J. Coudert, I. Jalencques (Clermont-Ferrand), I. Note (Marseille) et E. Albuisson (Clermont-Ferrand)

 

11. La phobie scolaire :

LÉGENDE ET MYTHE DE LA PHOBIE SCOLAIRE

Titre: The legend and the myth of school phobia
Auteurs: Kearney, Christopher A., Eisen, Andrew R., Silverman, Wendy K.
Source: School Psychology Quaterly, Vol. 10, p.65-85 (1995)
Résumé par :Par: Louise Trudel, psychologue Commission scolaire Morilac

http://www.aqps.qc.ca/bulletin/07/07-03-08.htm

La phobie scolaire est un trouble de comportement de l'enfance et de l'adolescence qui touche environ 5 % de cette population. Il en existe plusieurs définitions, mais on s'accorde à dire que les caractéristiques principales sont l'évitement scolaire et la peur irrationnelle liés à un stimulus scolaire ou la peur d'être séparé des parents. Les auteurs questionnent les limites et l'utilité d'un tel diagnostic.

La notion de phobie scolaire a fait son apparition dans la littérature dans les années 40. À cette époque, on a interprété le refus scolaire comme résultant d'une angoisse de séparation des figures parentales, surtout de la mère, parce que la relation mère-enfant aurait été symbiotique. C'était la grande époque de l'école psychodynamique. Dans les années 60, le béhaviorisme a redéfini le concept comme étant "un comportement d'évitement motivé par une peur intense de la situation scolaire et maintenu par des renforcements secondaires". La phobie scolaire est devenue une phobie simple spécifique. Toutefois, bien que les 2 conceptions (psychodynamique et behaviorale) n'aient jamais été conciliées dans une même définition, les cliniciens et les chercheurs les interchangent. Selon les DSM-III et IV, le refus de fréquentation scolaire peut être diagnostiqué, soit comme un trouble d'angoisse de séparation (Separation Anxiety Disorder) ou soit comme une phobie simple spécifique. De cette labilité diagnostique résulte une confusion dans les études portant sur les phobies scolaires. Ces mêmes études présentent plusieurs faiblesses au plan méthodologique. On ne peut donc généraliser les résultats obtenus, surtout en ce qui concerne une réelle angoisse d'être séparé du milieu familial.

Les auteurs questionnent l'appellation de phobie scolaire et se demandent si c'est bien une phobie i.e. une peur excessive, irrationnelle et spécifique, provoquant des comportements d'évitement. Dans une étude antérieure (1993), ils ont tenté d'évaluer l'intensité de la peur d'enfants refusant d'aller à l'école et l'ont comparée à celle d'autres enfants. Les résultats obtenus indiquent que ces enfants rapportent avoir davantage peur d'aller à l'école que les autres, mais ils n'indiquent toutefois pas une peur excessive comme l'exige le diagnostic d'une phobie. De plus, on retrouve chez ce groupe d'autres peurs de même intensité (ex. : la mort, les incendies, aller à l'hôpital, les cauchemars) qui ne sont pas considérées comme des phobies par les cliniciens.

Plusieurs auteurs des années 80 et 90 croient que l'anxiété générale est prédominante chez ce groupe d'enfants. La peur de l'école ne serait donc pas la caractéristique principale de cette population. En fait, ces enfants vivraient plutôt des affects négatifs (anxiété, dépression, baisse de l'estime de soi) qu'ils relieraient au monde scolaire.

Le terme "phobie scolaire" est requestionné également, puisque selon la définition du terme "phobie", la peur doit être liée à un objet spécifique. Or, l'école est un ensemble de stimuli. Savoir qu'un enfant a une phobie scolaire donne peu d'informations sur l'objet de sa peur. À partir de données recueillies auprès d'enfants, de parents et de cliniciens, les auteurs avancent l'idée que, plus qu'un objet tangible spécifique, ces enfants craindraient les situations sociales et craindraient d'être jugés, évalués, de ne pas être appropriés devant les autres. Plutôt que de parler de phobie scolaire, il serait plus approprié de parler d'un "évitement d'un stimulus provoquant un état émotif négatif ou d'une situation sociale-évaluative aversive dans le cadre scolaire".

À partir de ces données sur la phobie scolaire, les auteurs proposent de porter une attention particulière à l'évaluation de l'anxiété et de la dépression ainsi qu'aux événements scolaires de nature sociale-évaluative plutôt que d'axer l'évaluation sur la peur de l'école. Ils suggèrent de mener une évaluation attentive et détaillée de cette population afin d'identifier la fonction spécifique du refus scolaire et de pouvoir ainsi déterminer des objectifs pertinents de traitement. Il s'agit d'abord d'effectuer un dépistage des enfants vivant des craintes à fréquenter l'école pour identifier les cas où le refus scolaire résulte d'un autre problème (ex. : dépression sévère, comportement d'opposition, trouble d'apprentissage). Dans les cas où le refus scolaire est la difficulté première, il s'agit de discriminer ceux qui évitent un stimulus provoquant en eux un état émotif négatif de ceux qui désirent éviter une situation sociale-évaluative. Les auteurs recommandent d'employer une variété de procédures pour corroborer ce diagnostic (entrevues et questionnaires à l'enfant, aux parents et aux enseignants). Cette façon de procéder permet d'obtenir un portrait détaillé de l'enfant, ce qui est beaucoup plus aidant pour le traitement que ne l'est le diagnostic de phobie scolaire. Le traitement prescrit doit découler directement du portrait obtenu.

- Pour les enfants qui cherchent à éviter un stimulus provoquant en eux un état émotif, les auteurs suggèrent une thérapie basée sur la désensibilisation systématique et immédiate (dans les cas aigus) ou une exposition graduelle à la situation scolaire. Pour plusieurs de ces enfants, le sentiment d'inconfort n'est pas relié à un stimulus particulier. Des techniques de relaxation peuvent être enseignées et, dans les cas extrêmes, une médication anxiolytique ou antidépressive peut être prescrite.

- Dans les cas d'aversion sociale-évaluative, les auteurs suggèrent des jeux de rôles pour développer les habiletés sociales et une thérapie cognitive pour travailler les distorsions de la pensée (ex. : peur d'être ridicule, d'être rejeté, de décevoir parents et enseignants).

- Pour les enfants dont le refus scolaire est un moyen d'obtenir de l'attention, l'intervention est faite auprès des parents, sous forme d'entraînement à certaines habiletés (ex. : renforcement des comportements scolaires appropriés, mise en place de règles claires, retrait de l'attention pour les comportements inacceptables).

- Enfin, dans les cas d'enfants qui refusent d'aller à l'école parce qu'ils obtiennent des renforcements positifs tangibles, les auteurs recommandent une thérapie familiale et la mise en place de contrats. L'intervention doit viser à réduire le conflit familial, à augmenter les incitations à la fréquentation scolaire et à diminuer les renforcements positifs du refus scolaire.

Il est évidemment possible de rencontrer des cas mixtes, il faut alors en tenir compte dans le plan de traitement proposé.

 

Ce dossier a été réalisé par Macha.

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